Intervention de Gaëtan Levitre, Conseiller départemental, président du groupe CEC
Monsieur le Président, Chers Collègues,
Nous voici réuni pour la discussion et le vote du budget du Département de l’Eure, dans un contexte économique et social extrêmement difficile. Je souhaite avant toute chose, remercier les services de notre collectivité pour avoir su mener cet exercice complexe dans des conditions peu favorables ; j’y reviendrai dans quelques instants.
Il n’y aura pas de la part de notre groupe de cris d’orfraie et d’étonnement face à ce budget d’austérité qui nous est présenté aujourd’hui.
Nous constatons quand même qu’il est très éloigné des beaux slogans et déclarations d’audace que vous nous aviez particulièrement concoctés lors de la campagne électorale, d’il y a un an.
Nous devions pourtant voir ce que nous allions voir. Mais forcé de constater que les discours sont restés aux archives et que les propositions on fait « Pschittt » pour reprendre la formule de l’une de vos grandes figures.
Cette crise d’un système à bout de souffle qui creuse les inégalités et le mal être en faisant supporter aux collectivités le poids des besoins de plus en plus pressant, au moment même où leurs moyens sont asséchés.
Asséchés ? Détournés plutôt ! Oui « détournés » pour d’autres causes bien éloignées de l’intérêt général telles que les 40 milliards d’euros attribués au patronat dans le cadre du pacte de compétitivité parrainé par le Medef et soutenu par la droite.
Le budget d’austérité qui nous est présenté aujourd’hui, est donc pour partie la conséquence même des réformes que vous avez soutenues.
Ce qui nous fait sourire, c’est l’étonnement factice de la majorité départementale actuelle face à cette situation. Pourtant certains de ses membres étaient déjà sur les bancs de notre assemblée les mandats précédents : d’où l’étonnement factice…
Depuis des années, les élus du groupe communiste tirent le signal d’alarme. A chaque discussion budgétaire nous sommes intervenus pour dénoncer catégoriquement le désengagement de l’Etat orchestré par le Gouvernement, que ce soit celui d’hier ou celui d’aujourd’hui.
Nous ne comptons même plus les motions déposées exigeant de l’Etat qu’il reprenne à son compte certaines compétences ou qu’il donne les moyens aux collectivités concernées de pouvoir assurer ces missions décentralisées.
Ainsi en octobre dernier, le groupe CEC intervenait pour la renationalisation du financement du RSA : entendez par là le maintien de sa gestion par nos services compétents du Département.
Renationalisation qui a fait encore beaucoup discuter lors de l’assemblée générale des départements de France, particulièrement au sein de la droite où les avis sont partagés.
Quand on parle de difficultés budgétaires du Département de l’Eure, il est selon moi, pour le moins fallacieux de pointer du doigt la gestion de la majorité précédente.
Au fond, et vous le savez bien, seuls les gouvernements successifs sont responsables de cette situation. Celui d’hier qui a organisé le gel des dotations d’Etat et celui d’aujourd’hui, qui au prétexte d’une réduction de la dette publique pour rentrer dans le formatage libéral de l’Europe de Bruxelles, détourne littéralement les finances des collectivités territoriales.
Oui, c’est une faute majeure qui place malheureusement les Départements et les Communes dans une situation financière intenable. Il reste donc peu de marge d’autonomie pour mener des actions facultatives qui pourtant font le sel de notre démocratie.
Et on en voit les conséquences sur ce budget. Vous venez de faire le choix de vous recroqueviller sur les dépenses obligatoires et qu’importe si des mesures utiles pour les Eurois sont supprimées !
Nous n’acceptons pas et ne partageons pas certains choix budgétaires qui nous sont aujourd’hui imposés et dont la note serait de nouveau payée par les plus défavorisés.
Plusieurs choses à titre d’exemples Monsieur le Président :
Nous ne pouvons que condamner la suppression des bourses Aristide Briand pour les lycéens partout à l’étranger.
La suppression des aides financières dont bénéficiaient les usagers empruntant le péage d’Incarville ou celles des usagers du Pont de Normandie qui se rendent au travail sont pour le moins inacceptables.
La suppression de la participation financière du Département aux 1 200 usagers empruntant le péage d’Incarville peut avoir des conséquences dramatiques et vous le savez bien. En termes de sécurité bien sûr puisqu’elle incitera les automobilistes à se diriger vers la sortie n°20 de Criquebeuf-sur-Seine ou comme vous le savez, un drame malheureusement est annoncé.
Nous réaffirmons notre attachement au service public, et en particulier à la gratuité du bac de Quillebeuf-sur-Seine.
Nous sommes inquiets et sans nouvelle des constructions programmées de certains collèges dont les travaux étaient prévus en 2017.
Néanmoins, et pour conclure sur une note d’optimisme, je note que face à la mobilisation des Départements et des populations (20 000 pétitions signées dans le Val de Marne, pour ne prendre que cet exemple) le Gouvernement Valls devrait annoncer dans les prochains jours des mesures concernant le financement du RSA. Même si le compte n’y est toujours pas, nous devons exiger que l’Etat rembourse aux Départements les sommes dues avec le choix de 2014 comme année de référence.
Nous ne connaissons pas encore le chiffre exact que cela peut représenter pour l’Eure, mais cette somme qui devrait se chiffrer à quelques millions d’euros nous permettrait de retrouver une certaine autonomie financière.
Monsieur le Président, Chers Collèges,
Vous vous offusquez des conséquences de la politique de l’Etat sur les finances du Département, pourtant ces actions mortifères pour notre collectivité ne sont pas nouvelles. Elles datent de bien avant 2012.
Vous criez au loup mais vous restez sur le constat et la gestion.
Lorsque le groupe communiste et républicain propose à l’Assemblée Nationale un texte de loi concernant la taxation des actifs financiers, ce qui aurait pour conséquence de débloquer immédiatement pour nos collectivités 20 milliards : vos amis de droite votent contre.
Notre groupe se refuse donc à vous suivre dans vos postures paradoxales. Nous sommes porteurs de propositions crédibles et je viens d’en évoquer quelques-unes.
Il faut impérativement nous positionner sur la reconquête de l’essentiel : finances, démocratie et services publics avec responsabilité, avec l’ambition de continuer à agir efficacement au service de nos habitants.
Pour ce qui concerne notre groupe, il prend toute sa part aux revendications communes exprimées en direction de l’Etat. Cependant, nous n’apporterons pas notre caution au plan d’économies de la majorité départementale, qui pénalisera les Eurois les plus fragiles.
Nous ne voterons donc contre ce budget d’austérité.